Preuve des heures supplémentaires
Le principe. En cas de litige sur l’existence ou le nombre d’heures de travail accomplies par un salarié, l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par ce salarié. Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande en paiement d’heures supplémentaires, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si l’employeur contrôle et décompte les heures de travail accomplies par chaque salarié par un système d’enregistrement automatique, ce dispositif doit être fiable et infalsifiable (C. trav. art. L 3171-2 à L 3171-4) .
Preuve partagée pour le juge. De ce principe, la Cour de cassation en retient un partage de la preuve entre l’employeur et le salarié. Le salarié doit présenter au juge, à l’appui de sa demande de paiement d’heures supplémentaires, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies pour permettre à l’employeur d’y répondre en produisant ses propres éléments (Cass. soc. 18‑3‑2020 n° 18-10919) . Le salarié peut fournir des documents qu’il a lui-même établis après avoir quitté l’entreprise et qui sont factuels avec un minimum de précisions (Cass. soc. 27‑1‑2021 n° 17-31046) .
Illustration. Un salarié expert en sécurité qui a été licencié a contesté en justice le bien-fondé de son licenciement et réclamé un rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires. Pour justifier sa demande, ce salarié a produit des courriels envoyés tôt le matin ou tard le soir, des attestations relatant que les clients pouvaient prendre rendez-vous de 9 h à 21 h du lundi au samedi, voire le dimanche au besoin, et un tableau récapitulatif des heures supplémentaires réalisées indiquant qu’il avait effectué 31 heures supplémentaires toutes les semaines pendant 3 ans. En appel, sa demande a été rejetée car non suffisamment étayée. Les juges ont considéré que le salarié n’apportait pas d’élément sérieux sur l’exécution des heures de travail au titre desquelles il sollicite le paiement de salaires.
Des éléments suffisamment précis. La Cour de cassation n’est pas de l’avis des juges. Elle a jugé que le salarié présentait des éléments suffisamment précis pour permettre à l’employeur de répondre. En rejetant sa demande, les juges ont fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié (Cass. soc. 28‑9‑2022 n° 21-13496) .
Initiative des heures supplémentaires
Droit au paiement des heures supplémentaires. Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, si celles-ci ont été demandées par l’employeur ou si elles sont réalisées avec l’accord au moins implicite de l’employeur ou encore s’il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.
Dans cette affaire. Les juges ont rejeté la demande de paiement des heures supplémentaires au motif que le salarié n’avait jamais sollicité de son supérieur hiérarchique une autorisation d’exécuter des heures au-delà de celles prévues au contrat, et n’avait pas évoqué avec lui la nécessité de réaliser un nombre aussi conséquent d’heures supplémentaires pour atteindre ses objectifs.
Paiement des heures supplémentaires réalisées avec un accord tacite. La Cour de cassation a censuré la décision des juges. Elle a rappelé que l’absence d’autorisation préalable n’excluait pas en soi un accord tacite de l’employeur à la réalisation d’heures supplémentaires (Cass. soc. 28‑9‑2022 n° 21-13496) . L’affaire doit donc être rejugée.